( Si ma psychologue voyait le titre, elle dirait :
- enfin on y vient ! »
- « dommage, Madame, je pense bien à vous »)
C'était un verger, longé par un muret
Chaque soir d'été ,dieu sait ce qu'il faisait chaud cette année-là, familles, amis, voisins , petits , chiants et morveux, la couche pendante entre les jambes , assis , ordonnés, à la queue leu leu attendaient la fraîcheur de la nuit pour s'en aller dormir.
Et nous autres adolescents, derrière ce muret, sous le regard de nos parents qui détournaient la tête de temps à autre, on jouait, on jouait à la dame et...
On commençait par cueillir des cerises des plus éclatantes.
Suspendues par deux sur nos oreilles, elles devenaient de véritables bijoux, avant d'être pressées entre nos doigts. Les éclaboussures, à éviter sur nos vêtements tel était le jeu qui suivait !
« Dis, cousine, si l'on devenait plus grandes, de grandes dames ? »
« Mais comment ? »
«Avec des prunes, cache-moi, elles sont encore vertes, je vais en cueillir discrètement »
Et voici .De deux, chacune placée dans les chaussures, s'identifiant aux talonnettes, et pour nous quelques centimètres de plus.
Avez-vous essayé de marcher avec des prunes dans les chaussures, surtout quand seule une bride les maintienne à l'arrière ? : essayez, çà en vaut la peine (pas toi Camomille)
L'une d'elle échappait et roulait au sol, l'autre glissait à l'avant, quel sport pour rester en équilibre, mais quelle fierté, quand on faisait quelques pas sans se tordre les pieds, et nous les filles, grandies de plusieurs centimètres.
Boucles d'oreille, talons hauts, que manquait-il pour parfaire notre féminité ?
«Dis, cousine, cache-moi encore, direction le pêcher, les fruits sont un peu plus gros, plus ronds, et encore si fermes »
Les garçons nous suivaient, tout excités de constater de telles métamorphoses, rieurs de nos bêtises.
Pardonnez-moi, une petite pause ‘ pipi ' avant la suite... (Incroyable ce que j'ai pu faire !)
Avez-vous connu le ‘cache-nénés ‘ ? Non. C'était un bandeau que nos mères nouaient autour de notre poitrine pour la maintenir avant que les seins trouvent accessoire à leur taille.
Et bien, de deux pêches bien fermes et bien rondes, glissées sous ce bout de tissu, le chemisier ainsi tendu laissait supposer certains avantages, nous étions pareilles à de petites femmes. Il fallait y penser, non ?
A ce qu'il parait, en matière de réflexion, j'avais toujours des idées un peu farfelues.
Et le jeu se terminait en cache-cache derrière le tronc des arbres, la nuit commençant à tomber.
Un soir, l'un de mes soupirants m'avait rejoint, enserré le tour de taille, lèvres couchées sur mon cou.
« Pépé, Pépé où es-tu, il faut rentrer » ! Pas vrai, je rêve ! !
C'était la voix de mon père, avec ce Pépé exaspérant, je ne voulais plus être une poupée
Mon petit homme s'était fait prestant, et de ses doigts malhabiles avait fait sauter les pêches de mon bustier pour me ‘ chatouiller le bout des nénés ‘ !
«Et alors, est-ce qu'il t'embrassé ? », demandait ma cousine le lendemain
« Non, rien, il n'a pas eu le temps »
Et en m'approchant de son oreille je lui murmurais :-«et je n'ai jamais su comment il avait les mirabelles dans le caleçon »
Ah, ce coquin de verger, il nous en aura fait dire de ces choses.