Lents ménagements
Elle a mis des années à comprendre que la forteresse dans laquelle elle s'était emmurée n'était pas ce qu'il lui fallait. D'ailleurs elle n'en avait même pas les clefs. Comment s'épanouir dans cet environnement délétére censé lui apporter la sécurité?
Il lui en a fallu du temps pour abattre les murs. Elle s'est arraché les ongles sur les parois de sa prison, où chaque bloc est une souffrance scellée par la honte et la culpabilité. Patiemment elle a tout déconstruit.
Subsistent encore quelques caves, des oubliettes, des boyaux tortueux rampant dans les sous-sols, et qu'elle n'a pu détruire. Elle l'accepte comme inévitable. Et tout édifice s'appuie sur des fondations enterrées, alors celles ci ou d'autres...
Elle s'est rebati un lieu à sa mesure, chaleureux comme le bois et clair comme le matin, mais avec néanmoins des barreaux aux fenêtres pour contenir l'hostilité du monde.
Elle entrebaille parfois la porte pour laisser entrer le dehors, mais l'essentiel de sa vie s'est concentré à l'intérieur, dans un long monologue. Il est long de se réapprivoiser. Remontent parfois des cachots enténébrés les vieux démons qu'elle y a murés, mais ils n'ont plus le pouvoir de franchir les murs qu'elle a érigés.
Elle est enfin chez elle, et peut jouir sereinement des ménagements qu'elle s'offre.
Fubuki
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