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Le blog a été ouvert le 24 janvier 2008. Jusqu'au 1 mars 2017, Azalaïs, Lilousoleil, Polly et Quichottine vous y ont proposé des jeux d'écriture en toute simplicité.

Mijoty d'Oncle Dan

 

Mijoty

 

 

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La sorcière Mijoty ne venait au village qu’une fois par an, au moment de Noël.

Tout le monde attendait impatiemment sa venue car elle n’avait pas son pareil pour raconter des histoires féeriques, le soir à la veillée.

Elle savait tenir son auditoire en haleine, étirait son récit jusqu’aux limites du point de rupture, et l’illustrait d’étranges phénomènes grâce à ses fabuleux pouvoirs magiques.

Ses contes et légendes emportaient les villageois sur des chemins de rêves peuplés de fées joyeuses qui piétinaient leurs soucis d’avenir, avant de les jeter brutalement dans de diaboliques terreurs dont ils ne pouvaient sortir que par une intervention chevaleresque ou divine.

L’auditoire frémissait comme un ventilateur électrique mais il ne pouvait pas le savoir, ce dernier n’ayant pas encore été inventé.

Le plus souvent, dénouement et dénuement se confondaient, laissant les héros pauvres comme Job avant l’invention de son papier à cigarettes. L’auditoire restait alors immobile et sans voix, un peu comme la poupée d’un ventriloque quand le ventriloque est parti boire à la taverne en l’abandonnant.

 

Durant cette nuit de Noël, un grand vent semblait balayer le monde.

Les hurlements de la tempête se jetaient sur la vieille chaumière d’Eulalie-Genièvre, qui servait de salle polyvalente, comme pour tenter de l’arracher de ses fondations et mettre un peu d’ambiance.

Les poutres du plafond grinçaient et gémissaient. Les bourrasques les plus violentes faisaient trembler les tables de sorte que les fiasques et les flasques tremblaient et s’entrechoquaient.

Avant même que Mijoty ne commence son récit, les villageois éprouvaient déjà une peur confuse et se serraient les uns contre les autres dans une odeur de porcherie surmenée, une odeur à couper au couteau mais qui ne chavire que les internautes comme nous qui ne sommes pas habitués à vivre au moyen âge.

Les flammes, dans la cheminée, dessinaient sur l’inquiétant visage de la sorcière des ombres démoniaques. Ses yeux rouges phosphoraient et ses cheveux jaunes se tenaient droit sur sa tête comme les plumes d’une poule effarouchée.

Elle commença alors le récit du renard bleu, de la rivière emprisonnée, de la clé d’or et de la petite fille aux yeux fermés : Un conte très alambiqué où se croisent une importante quantité de gnomes, de trolls, d’elfes et de lutins. Une histoire tirée du premier volume des grimoires intitulés Minimi Fabricata scribant, entièrement calligraphiés en latin par les moines défroqués de l’abbaye de Westminblog.

Lorsqu’elle parlait du renard bleu, son écharpe se mouvait étrangement et ressemblait à un goupil apprivoisé. Dès qu’elle évoquait la rivière emprisonnée, la pluie redoublait de violence et cognait avec une rage frénétique contre les fenêtres de la vieille chaumière.

Un instant, une clé d’or brilla dans la main aux doigts crochus de Mijoty.

Mais point de lutin ! Elle ne trouva pas le lutin qui avait endormi la petite fille.

Sans ce sacré lutin, la petite fille ne fermerait pas les yeux et le conte ne se terminerait jamais.

Elle chercha vainement dans les poches de sa houppelande, retourna sa musette. Les villageois se mirent à chercher aussi. La chaumière fut entièrement mise à sac au grand dam d’Eulalie-Genièvre. On fouilla même la boite de Pandore. En vain.

A ce moment, un volet fut arraché et tomba à terre.

La panique traversa le regard de Mijoty. Elle aurait accepté avec joie la tâche de terrasser un dragon aux narines incandescentes, mais il n’y avait plus la moindre chance pour qu’elle retrouve cet imbécile de lutin fugueur.

Alors, Barthélémy-Bartholomé, dit Gros Babar, un bûcheron sanguinaire à qui on ne la faisait pas, et qui ne se séparait jamais de sa hache, déplia ses deux mètres de muscles et gronda avec une colère rentrée : « Dis, Mijoty, il serait temps de finir ton histoire ! Mais où est-il donc passé ce sacré lutin ? »

Certains prétendent que c’est depuis ce jour-là que la sorcière Mijoty est plus connue sous le nom de sorcière Pispaparla.

 

 

Oncle Dan


http://oncledan.over-blog.com

 

Pour voir l'original chez Solyzaan

http://galeriesolyzaan.over-blog.com/article-la-sorciere-mijoty-60221766.html


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D
<br /> Une belle histoire qui joue sur l'humour, les rapprochements de mots et le conte.<br /> J'ai beaucoup aimé.<br /> <br /> <br />
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P
<br /> Un dragon aux narines<br /> Un poulet au curry<br /> Un gendarme aux aguets ?<br /> <br /> Loop<br /> <br /> <br />
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P
<br /> les facéties danesques me laissent comme un ventilateur électrique (mais là normal il a été inventé)et Mijoty devenant Pispaparla dans la vieille chaumière d'Eulalie-Genièvre et ne retrouvant pas<br /> le lutin (sûrement planqué dans la bibliothèque quichottinesque) me met d'une humeur fabuleuse.<br /> J'aime à penser être moine scribant de Minimi fabricata.<br /> :)<br /> <br /> <br />
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A
<br /> les lecteurs de la minimi fabricata sont vraiment très heureux mais je ne sais pas trop si Quichottine se retrouve dans ces moines des l'abbaye de Westminblog. Avec ce nouveau nom, on va la suivre<br /> à la trace la pauvre!<br /> <br /> <br />
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A
<br /> Un conte j'aime ! Crois-tu que Mijoty apprécie son nouveau nom ????<br /> <br /> <br />
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J
<br /> un CONTE, bien sûr !!!<br /> <br /> <br />
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J
<br /> un cone poétique<br /> et plein d'humour<br /> savoureux<br /> amicalement<br /> jean-marie<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Ce conte à ne pas dormir m'a bien fait rigoler entre poésie et lesterie compère Dan.<br /> <br /> <br />
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Q
<br /> ...<br /> <br /> Moi je sais où il est, le lutin, mais je ne dirai rien, foi de petit lutin bleu !<br /> <br /> J'ai adoré ton coloriage et la façon dont tu as réussi à m'emporter dans un ailleurs qui me plaît bien.<br /> <br /> Merci pour ce conte, Oncle Dan...<br /> <br /> <br />
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