Le blog a été ouvert le 24 janvier 2008. Jusqu'au 1 mars 2017, Azalaïs, Lilousoleil, Polly et Quichottine vous y ont proposé des jeux d'écriture en toute simplicité.
Lekba
Un jour, là-bas, mon regard à croisé celui de Lekba. J'avais accompagné mon mari qui commerçait au comptoir de St Louis, au Sénégal. De l'or et des épices seulement, jamais nous n'aurions fait commerce de « Bois d'Ebène » et nous évitions, autant que l'étiquette nous le permettait, de côtoyer les négriers. Cependant, un soir de février où l'harmattan soufflait, saupoudrant de sable le paysage, Monsieur Jean Baptiste du Casse, impassible, tenait salon et nous n'avions pu déroger à son invitation.
Lekba lui appartenait. Il était grand pour ses quatre ans, mais il était mal nourri par son maître. Cet homme détestable, négrier de son état, était à la tête de la Compagnie du Sénégal et notre Roi Louis le Quatorzième semblait lui accorder toute confiance. J'ai toujours eu le plus grand mal à contenir mes émotions et l'Afrique ensorcelante m'invitait de plus en plus à être moi-même.
Et Lekba, avec ses yeux immenses, sa peau qui, à la lumière des chandeliers était pareille à une étoffe moirée. Lekba que l'on avait habillé de bleu comme un page et qui suivait sagement son maître m'avait bouleversée. Le clavecin venu de France se mêlait au son lointain d'une kora, Lekba chanta. Son chant d'ange sans ailes exprima toute sa peine d'être encagé.
Cet appel, je ne l'oublierai jamais. Et je sais qu'un jour, j'irai là-bas, j'irai chercher Lekba.
Valdy