Personne
Personne ne frappe à ma porte, personne ne frappe jamais à ma porte.
Quand la porte du cagibi se referme sur moi, me plongeant dans le noir, je ne sais jamais combien de temps je vais rester là, seule dans le noir, sans que jamais personne ne frappe à ma porte !
Ce soir, encore, la porte du cagibi vient de se refermer sur moi.
J’ai entendu, comme à l’habitude, la clé faire un double tour dans la serrure, et puis Maman a cessé de crier.
Je n’ai même plus peur ; j’ai seulement un peu de peine, je ne comprends pas pourquoi Maman se fâche toujours. Je fais des efforts pour lui plaire, j’essaie de ne pas faire de bruit, je ne me plains jamais…
Et pourtant, ça finit toujours comme ce soir : sans que je comprenne pourquoi, Maman s’énerve, se met à crier et finit par m’enfermer dans ce placard obscur. Parfois, j’y reste tellement longtemps que mes genoux ne veulent plus se déplier quand je sors.
Au début, j’avais un peu peur toute seule dans le noir ; puis, petit à petit, je me suis habituée ; j’ai pris mes repères, je me rassure en regardant le faible rai de lumière qui filtre sous la porte.
En attendant que Maman se soit calmée et se souvienne qu’elle m’a enfermée là, je me raconte des histoires : je suis la pauvre Cendrillon que le Prince va retrouver grâce à mes souliers que Maman, tout occupée à sa colère, a laissé traîner dans le couloir ; une autre fois, c’est Merlin l’Enchanteur qui va sortir une formule magique de son grimoire, formule magique qui transformera Maman en une gentille maman qui me couvrira de bisous.
Perdue dans mes rêves, je ne vois pas le temps passer, je n’attends plus que quelqu’un vienne frapper à ma porte…
Jakline
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