Le manteau
Quatre francs six sous, c'était une affaire. Un morceau de tissu acheté en hâte à l'un des marchands ambulants qui parcouraient encore les rues, année mil neuf cent soixante deux environ.
Doigts de fée d'une couturière, en l'occurrence ma tante, qui avait réalisé sans patron, au mètre et à l'œil un manteau couleur anthracite où je cherchais mes pieds en l'essayant.
Trop long, trop large, mais il devait être porter au moins deux hivers.
Pas besoin de glace pour voir dans quel ridicule j'étais parée, à faire lever la patte du chien et p.... dessus !
Je pleurais à chaudes larmes, d'autant que pour agrémenter ma déception, on venait de me couper les cheveux courts, complètement hirsutes, tout çà parce que gentiment des poux venus de je ne sais où, avaient envahis mon cuir chevelu.
C'était un comble de me trouver la tête enfouie dans un col et de n'être plus que manchot.
Mais pis. Une telle fierté de la famille pour cette création, que j'inaugurais le nouvel art, et oui, et j'ai dû poser au bord d'un canal complètement gelé sur une épaisseur de glace d'au moins trente centimètres, pour que le souvenir du froid s'incruste sur lui et que l'image figure dans un album photos.
Croyez-moi, il n'est plus dans l'armoire, mais peut-être au fond d'un tiroir, pourrais-je le revoir .J'étais dans ma quinzième année, on ne badinait pas en ce temps-là !
Lilounette
http://au-fil-des-jours.over