La goualante des vieilles frusques
ou la ballade du blouson noir
c'est bien mon blouson de cuir
mais il est laid à faire fuir
sa couleur est plutôt grise
le noir s'est fait la valise
rapé
fripé
dans le dos y a pas eu d'aigle
c'était une de nos règles
les bourges nous distinguaient
à ce blouson qui les narguait
aujourd'hui l'est vraiment moche
elles en sont trouées les poches
un truc en nylon j'avais avant
le blouson du tout venant
des paumés des caves
des fleurs de nave
aux hommes il fallait la peau
si on voulait faire les beaux
si on voulait les belles gerces
pour des amours bien peu perverses
l'ai acheté quand j'ai gagné vingt ronds
Et fauché vingt de plus à un pochtron
pas osé piquer le blouson lui-même
pas très gonflé l'énergumène
il a bien fallu se mettre au boulot
c'était bien sûr pas trop mon blot
mais j'ai bossé de longues heures
gagné du fric j'ai fait mon beurre
j'ai bien bouffé et j'ai grossi
mon blouson a rétréci
sur ma carcasse
j'ai voulu le mettre à la casse
mais c'était trop de souvenir
j'ai senti des larmes venir
alors pauvre je lui ai fait grâce
il a fini dans un placard
comme un puni dans le mitard
des années l'a pioncé dans une armoire
et dans un coin de ma mémoire
j'ai vingt fois déménagé
mais j'ai bien su m'arranger
pour éviter de m'en défaire
des fois la vie est précaire
des fois la dèche est revenue
des fois la vie est saugrenue
il m'a pris l'envie le dimanche
de le mettre pour faire la manche
devant l'église sur le parvis
mais c'est resté rien qu'une envie
suis pas allé à la messe
mais j'ai tenu ma promesse
l'ai pas jeté aux orties
l'ai même parfois sorti
comme aujourd'hui je suis plus maigre
quand on vieillit tout tourne à l'aigre
je le mets pour bricoler
et ça me fait bien rigoler
ça me rappelle ma jeunesse
dans mon cœur une caresse
mais aussi bien des regrets
ce ne sont pas des simagrées
(refrain à placer ici ou là...)
si je meurs je veux qu'on m'enterre
dans ce blouson qu'a fait ma guerre
envoi
moralité frères et soeurs
un linceul même s'il a du coeur
n'a pas vraiment besoin de poches
ne lui en faites pas reproche
Jean-Marie